JOUR 7: BURGOS / FRÓMISTA (70 km)

Carte jour 7

PROPOSITIONS DE DIRECTIONS À PRENDRE

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Au départ de Burgos, après le pont Santa Maria, prendre à droite la voie cyclable du Camino qui longe la N120. Après 3 km, le Camino s’éloigne de la nationale. La route des pèlerins vous fera passer par Tardajos (route bétonnée), Rabé de las Calzadas, Hornillos del Camino et Hontanas sur un chemin de terre irrégulier avec des roches pour certaines portions. Il y aura des dénivelés à affronter, mais de merveilleux paysages.

· Ce n’est qu’à l’approche de Castrojeriz que l’on retrouve le béton. L’arrivée au village vous permet de profiter d’une belle vue.

· À la sortie de Castrojeriz, suivre le fléchage jaune destiné aux cyclistes à droite avant la montée. Vous suivez cette route jusqu’à Castrillo Motra de Judios. De là, la piste part sur la gauche à la sortie du village. Cette route goudronnée (BU-403) retrouve le chemin des pèlerins au niveau de l’ermitage San Nicolas de Puente Fitero, qui se trouve à gauche avant le pont sur le río Pisuerga.

· Pour poursuivre sur le Camino : à l’ermitage San Nicolas, après le pont, prendre la piste à droite à l’entrée de laquelle se trouve un grand panneau qui présente la carte du Camino Francés en Castilla Y León en direction d’Itero de la Vega à 2 km. (Compostelle à vélo)

· (De notre côté, nous avons continué sur la BU-403, à partir de l’ermitage San Nicolas. La BU-403 devient la P-403, qui nous amène jusqu’à Frómista)

RÉCIT

En début de journée, le Camino nous conduit sur de petites routes de campagne, tout en douceur. Nous profitons tellement de ces portions du parcours qui nous réconfortent, tout en nous mettant dans les meilleures dispositions physiques et psychologiques pour affronter courageusement les éventuels défis du Chemin. Nous délaissons, toujours avec une certaine appréhension, le béton pour poursuivre sur un sentier de terre battue. Le paysage demeure désertique.

À Rabe de las Calzadas, sur le chemin des pèlerins, apparaît une petite chapelle. Comme à l’habitude, je passe tout droit et c’est Sylvie qui roule derrière moi qui m’alerte sur l’intérêt de cette mystérieuse voûte. Nous déposons nos vélos et entrons tout doucement dans cette minuscule pièce où se trouvent deux sœurs assises sur un banc et devant elles, une table où sont disposées des médailles. L’une des deux semble être la responsable de l’accueil des pèlerins à qui elle donne un médaillon qu’elle bénit à l’aide d’une prière de circonstance. Sylvie est la suivante. Elle reçoit son modeste bijou sacré et récite tant bien que mal la pieuse invocation en espagnol. À mon tour maintenant. La religieuse me demande d’où nous venons et c’est ainsi qu’elle me surnomme Maria Canada. Elle me remet la médaille attachée à une simple corde en me regardant intensément avec ses beaux yeux bleus, tout en déclamant la litanie d’usage. Chacune de notre côté, nous assimilons ce moment avec une certaine émotion. Nos porte-bonheur bénis feront en sorte que Marie nous accompagnera sur la route. Bien que je ne sois pas croyante, je trouve cette cérémonie très touchante. Ces occasions de recueillement sur le Chemin prennent une dimension insoupçonnée. Par respect, nous avons enfilé cette humble médaille pour la suite de notre parcours. Comme le veut la tradition, les sœurs ont mis le cachet d’usage sur notre credencial

Jour 7 rabe de las calzadas

 

Un peu plus loin, toujours sur le Camino, j’aperçois sur une roche une paire de vieilles godasses qui ont rendu l’âme. Cette scène en dit long sur le quotidien de la marche et ses défis. On peut imaginer que le pèlerin aux pieds endoloris a dû accepter un accord de cessation des hostilités avec ses chaussures fatiguées. Mon vélo, que je dois appuyer pour m’arrêter, a un air bien agile, malgré son poids, en comparaison avec ces bottes de marcheur.    

Jour 7 1

Nous poursuivons sur la route des pèlerins et traversons quelques villages plus pittoresques les uns que les autres. Lors d’une pause, nous retrouvons notre Australienne qui vient de se procurer un coca-cola pour se donner du « power ». C’est un plaisir de lui parler à nouveau, comme si elle était une des nôtres. C’est la dernière fois que nous la croiserons malheureusement. Sur le Camino, nous constatons une fois de plus que de rouler sur ces pistes de terre au gros soleil demande beaucoup de vigueur. Nous n’étions pas du tout préparées à cette exigence et développons rapidement des stratégies pour assurer notre hydratation et alimentation. L’expérience nous apprend que les barres d’énergie enveloppées de chocolat sont à proscrire. La chaleur transforme le tout en un mélange peu appétissant.

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Après avoir grimpé quelques bonnes pentes à pousser notre vélo, nous apercevons Hontanas. Même si l’approche du village apporte un réconfort, puisque nous pourrons nous y arrêter pour la pause du dîner, le chemin que l’on entrevoit au loin nous alarme passablement. Devrons-nous poursuivre sur cette route ? Petit moment d’inquiétude ici.

La photo ne rend pas justice à l’ampleur du défi que représente cette route qui se dessine à la sortie du village. Fort heureusement, en quittant Hontanas, le Camino nous dirige vers une tout autre voie. On l’a vraiment échappé belle.

Pour la dernière partie du trajet, nous reprenons la route nationale où les dénivelés se succèdent sans relâche. Pour raffiner ma technique de l’ascension des côtes, au-delà de l’utilisation adaptée des vitesses, j’apprends à focaliser mon attention sur ma roue avant et non pas sur le sommet. Apercevoir au loin le haut de la pente engendre une dose de lassitude à mes jambes. Je me suis imaginé un nouveau mantra, « ne pas regarder plus loin que le bout de ma roue avant ». J’ai surnommé cette approche « full mindness de la roue avant » ou la « pleine conscience de la roue avant ». J’ai tellement bien intégré cette philosophie novatrice que j’ai à un moment heurté de plein fouet Sylvie qui m’attendait au sommet d’une côte.

Après avoir roulé 70 km, nous arrivons finalement au petit village de Frómista où nous avons réservé une chambre. L’accès à cette auberge située au centre d’une grande place est simplement magique. L’environnement est des plus accueillants après une journée d’effort sous le soleil.

Nous sommes accueillies de façon particulièrement chaleureuse par un homme d’un certain âge qui nous attendait bien calmement sur le balcon. Avant de monter à la chambre, il nous offre une bière et de l’eau. L’environnement est empreint de simplicité et de confort. Malgré notre espagnol de débutantes, nous parvenons tout de même à échanger avec cet homme souriant et ainsi lui témoigner notre reconnaissance. En soirée, nous profitons d’une belle terrasse qui se trouve juste à côté de notre humble auberge. Nous sommes entourées de villageois du coin et les serveurs déploient une gentillesse qui nous comble en cette fin de journée. Au menu du pèlerin, un poisson grillé que nous dégustons sans aucune modération.

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RÉFLEXION DE LA JOURNÉE

Le penseur

Les jours se suivent, mais ne se ressemblent pas. Bien que nous accomplissions les mêmes choses, notre quotidien de pèlerins à vélo ne tombe aucunement dans la redondance. Peu importe si le parcours se termine tôt ou tard en après-midi, je constate que les journées passent tellement vite. Je ne sais si c’est parce que nous nous concentrons sur des aspects bien pratiques d’un tel périple : l’effort constant, les repas, la lessive, la récupération, etc. Chose certaine, nous avons créé Sylvie et moi un rythme agréable et très décontracté. Possiblement que l’intensité de l’ardeur exigée quotidiennement fait en sorte que l’énergie restante n’est dédiée qu’au bien-être. Il n’en tient donc qu’à nous deux et je crois que nous avons bien pris conscience de notre pouvoir en ce sens.

J’aime particulièrement notre rituel de fin de journée, au moment où nous prenons possession de notre chambre. Après avoir organisé minimalement les lieux, Sylvie prend sa douche et de mon côté je contacte Carole, ma conjointe, par Face Time. C’est toujours réconfortant et rassurant de la retrouver. Le fait de se rencontrer visuellement tous les jours me fait sentir moins loin et, comme le mentionne régulièrement Sylvie, « Carole fait partie de l’équipe ». C’est ainsi que lorsque Sylvie a terminé sa toilette, elle se réjouit de pouvoir dire quelques mots à ma compagne et généralement, toutes les deux en profitent pour se moquer de mes travers. Ces moments mettent du baume au cœur. Cette habitude d’échange virtuel m’amène à établir un lien avec ma manie d’étalage discuté hier. Ces deux pratiques que j’ai instaurées très rapidement dans mon quotidien me permettent de contrôler la fin de la journée. Je crois bien que ces traditions, en contraste avec l’imprévisibilité de la route, contribuent d’une certaine façon à maintenir mon équilibre personnel sur le Chemin.